Comment lutter contre les châtiments corporels à l'école ?

De plus en plus de voix s’élèvent en Afrique centrale pour décrier les punitions physiques à l’école. L’OMS relève leur impact sur la santé des victimes et propose des solutions disciplinaires plus douces.

Arnaud Ntchapda
Arnaud Ntchapda
Rédigé le , mis à jour le
Un enfant qui dit stop
Un enfant qui dit stop  —  Shutterstock

"Rangez votre fouet". C’est l’injonction de la ministre des Enseignements secondaires du Cameroun aux enseignants. Mi-janvier, la professeure Pauline Nalova Lyonga a signé l’interdiction de l’usage du fouet à l’école. Cependant, il s'agit là seulement d'un rappel car une première mesure d’interdiction des sévices corporels contre les élèves avait été prise en 2009 sans être réellement appliquée. 

De plus, si l’on observe la situation dans la sous-région Afrique Centrale, le Cameroun n’est pas le seul pays où les baffes, les coups de fouet ou de bâton sont administrés aux enfants scolarisés. En République démocratique du Congo aussi, les châtiments corporels sur les élèves ont été interdits en 2009 sans que les habitudes changent. Un enseignant d’école primaire qui reconnaît y recourir assure que c’est la "meilleure méthode" pour faire obéir les enfants. Le Tchad, lui, a fait du fouet l’un des instruments servant pour l’éducation de ses élèves.

À lire aussi : Au Sénégal, 27 % de filles et de femmes subissent des violences physiques

Des coups aussi au moral

Une situation que déplore la Ligue de la zone Afrique pour la défense des droits des enfants et élèves (Lizadeel). Pour cette organisation, "fouetter est une forme de torture". Il y a toutefois des espoirs de changement. 

En juin 2022, la congrégation des Frères des écoles chrétiennes ont formé 200 enseignants et personnels administratifs à l’usage des méthodes éducatives positives. Les bénéficiaires ont par exemple réfléchi aux comportements appropriés et inacceptables, car les conséquences sur la santé psychologiques comme physiologiques des victimes sont très négatives, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

La douleur, la tristesse, la peur, la colère, la honte et la culpabilité sont les sentiments qui reviennent souvent chez les enfants. Aussi, "le fait de se sentir menacé conduit à un stress physiologique et à l’activation de voies neuronales qui aident à faire face au danger. Les enfants qui ont été punis physiquement ont tendance à présenter une réactivité hormonale élevée au stress, une surcharge des systèmes biologiques, qu'il s'agisse des systèmes nerveux, cardiovasculaire ou nutritionnel, et des changements dans la structure et le fonctionnement du cerveau".   

Former les enseignants

Et les conséquences des sévices se poursuivent jusqu'à l'âge adulte. L’OMS relève des problèmes de santé mentale, parmi lesquels des troubles du comportement et des troubles anxieux, la dépression, la faible estime de soi, l’automutilation, les tentatives de suicide, la dépendance à l’alcool et aux drogues, l’agressivité...  "Il existe des preuves d’une relation de cause à effet, des études ayant révélé que le lien avec l’agressivité des enfants et de moins bons résultats en mathématiques et en lecture devenait de plus en plus manifeste à mesure que la fréquence des châtiments corporels augmentait", fait savoir l’OMS. 

En 2019, elle a édicté un guide pratique intitulé "Prévention de la violence à l’école". Le document stipule que tous les enseignants doivent être formés à la discipline positive et à la gestion de classe dans le cadre de leur formation professionnelle continue. Il promeut la gestion des écarts de conduite "au moyen de stratégies non violentes qui permettent aux enfants de comprendre leurs erreurs et d’en tirer des enseignements". Priver l’enfant d’un temps de jeu, lui faire nettoyer son bazar, le faire changer de place sont quelques-unes des punitions qui doivent remplacer les coups, la fessée, les coups de bâton ou les passages à tabac, l’humiliation, le dénigrement.      

Pour ne manquer aucune info santé, abonnez-vous à notre newsletter !