Violences sexuelles : en Côte d'Ivoire, les mentalités doivent encore évoluer

Les associations féministes ivoiriennes se sont indignées après la diffusion d'une émission faisant l'apologie du viol. Un signe que les mentalités doivent encore évoluer dans ce pays et sur le continent tout entier.

Badr Kidiss avec AFP
Badr Kidiss avec AFP
Rédigé le , mis à jour le
Les mentalités doivent encore évoluer pour mettre fin aux violences sexuelles (Image d'illustration)
Les mentalités doivent encore évoluer pour mettre fin aux violences sexuelles (Image d'illustration)

Non à la banalisation du viol ! Les femmes ivoiriennes se sont dressées contre les violences sexuelles après la diffusion d'une émission de télévision mettant en vedette un "ex-violeur". La Nouvelle chaîne ivoirienne a diffusé, à une heure de grande écoute et en public, une émission censée dénoncer les violences sexuelles. Mais la séquence a tourné à l'apologie du viol. Sur le plateau, Kader Traoré, présenté comme un violeur repenti, était invité par l'animateur à expliquer comment il abusait de ses victimes. Une scène surréaliste, au cours de laquelle l'animateur aide le violeur à allonger un mannequin sur le sol et lui demande, en riant, de montrer ses techniques pour violer une femme, puis ses "conseils" aux femmes, pour éviter de se faire violer. 

Les réactions ne se sont pas fait attendre, tant sur les réseaux sociaux que dans la vraie vie. Des femmes se sont rassemblées devant les locaux de la chaîne NCI, pour demander des sanctions contre l'animateur et son invité. Elles réclament également "la création d’une plage horaire pour donner la parole aux victimes" et "sensibiliser au viol et aux violences sexuelles". Une pétition lancée lundi soir par Désiree Dénéo, secrétaire générale de la Ligue ivoirienne des droits des femmes pour dénoncer l'animateur et sa chaîne et réclamer des sanctions, avait récolté mercredi plus de 46.500 signatures. 

La justice se mobilise

Pour les associations féministes, la diffusion d'une telle séquence est loin d'être un incident anodin. "C’est une chaîne très suivie dans un pays où le taux d'analphabétisme est élevé. Les gens voient des choses à la télé et les reproduisent", s'indigne Fatim Sylla, blogueuse et membre de l’association d'aide au développement des femmes et des enfants, Allo Bénévoles. "Utilisons la télévision pour éduquer",  exhorte-t-elle. La Haute autorité de communication audiovisuelle (Haca) a suspendu le présentateur, Yves de M'Bella, de toutes les antennes et télévisions de Côte d’Ivoire pendant 30 jours. Et le comité d'organisation du concours Miss Côte d'Ivoire, qui a lieu samedi, a annoncé qu'il n'animerait pas la soirée comme c'était initialement prévu.

Mais pour Bénédicte Joan, présidente de l'association Stop au chat noir, qui vient en aide aux victimes de viol, "ces sanctions ne sont pas suffisantes". Bien qu'il ait demandé "pardon" et se soit déclaré "meurtri", Yves de M’Bella "ne devrait plus du tout apparaître sur nos télés", a-t-elle ajouté. La justice a aussi réagi. Le présentateur a été condamné à 12 mois de prison avec sursis pour "apologie du viol" et "atteinte à la pudeur". Quant à Kader Traoré, déjà condamné par le passé pour viol et coups et blessures, il a écopé de 24 mois de prison ferme et 500.000 FCFA (750 euros) d'amende pour les mêmes motifs. Mais ces sanctions restent trop faibles pour les associations féministes, qui réclament surtout plus de prévention afin de faire changer les mentalités. 


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