En Afrique, la difficile lutte contre l'hémophilie, une grave maladie hémorragique

L’hémophilie est une grave maladie hémorragique qui empêche la coagulation du sang. Elle nécessite un traitement à vie et des précautions au quotidien pour limiter les saignements. Mais son taux de diagnostic reste faible dans les quatre coins de l'Afrique.

Barou Dembélé avec Badr Kidiss
Rédigé le
L'apparence physique du bras d'un hémophile
L'apparence physique du bras d'un hémophile

Lorsque nous nous coupons, le corps déclenche une série de réactions pour empêcher la plaie de trop saigner. C'est ce que l'on appelle la coagulation. Dans les conditions normales, cette dernière entraîne alors la formation d'un caillot pour contrôler l'hémorragie. Plusieurs paramètres, qu'on appellent "facteurs" sont nécessaires et doivent être réunis : les plaquettes, la fibrine et treize autres, numérotés de 1 à 13. Mais en cas d'hémophilie, la coagulation ne se fait pas correctement. Si c’est le facteur 8 qui est absent on parle d’hémophilie A. Et si c’est le facteur 9, on parle d’hémophilie B. 

Difficile de connaître le nombre de personnes concernés par cette maladie en Afrique. Mais on estime que l'hémophilie A touche au moins 1 homme sur 6.000 dans le monde, alors que l’hémophilie B, qui est plus rare, affecte 1 homme sur 30.000.  

Une maladie mal diagnostiquée en Afrique

Si diagnostic est généralement posé lors des premiers mois de vie, lorsque le bébé quitte les bras de sa mère et s'expose aux premiers bobos, cet examen reste difficile dans certains pays du continent. Le mauvais état des routes rend complique les déplacements des personnes atteintes de maladies du sang pour recevoir un diagnostic et des soins.

Selon le degré d'activité des facteurs en question, l'hémophilie peut être mineure, modérée dans 10 à 20%, ou sévère. Et si la maladie concerne essentiellement les garçons, les filles peuvent elles aussi présenter une forme habituellement mineure de la maladie : la forme symptomatique d’hémophilie A. 

Mal diagnostiquée en Afrique, l'hémophilie est très handicapante. "Les perfusions, c'est mon quotidien. Vous voyez toutes mes veines ont été piquées. Parfois, je m'en sors avec des gonflements" confie Bigué Yade, 22 ans, dont le rêve de devenir policière a été brisée par l'hémophilie. Cette maladie l'oblige à se rendre trois fois par semaine au Centre national de transfusion sanguine (CNTS) du Sénégal pour des injections qui "peuvent coûter jusqu’à 340.000 F CFA" pour arrêter les saignements. 

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Superstitions et réalités

L'hémophilie ne s’attrape pas. On naît avec et on vit avec. Mais dans une Afrique où les superstitions autour de certaines maladies méconnues font fureur, les hémophiles sont les oubliés de la santé. Au Sénégal, les derniers recensements font état de 340 cas diagnostiqués alors que les prévisions tournent autour de 1.700 malades, d’après le professeur Saliou Diop, directeur général du CNTS. 

"Une de mes petites cousines avait des bleus partout et de nombreux saignements. Alors toute la famille décide de faire le dépistage. Les résultats sont effarants. C'est à ce moment-là qu'on a découvert que mon père, ses sept frères et sœurs, et moi-même étions tous atteints" par l’hémophilie, témoigne Moustapha, un Sénégalais d'une trentaine d'années, à nos confrères du quotidien Walfadjri. 

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Est-ce que l'hémophilie se soigne ?

Pendant longtemps, la médecine n'a su que faire devant cette anomalie génétique et les malades mouraient très jeunes de cette maladie. Les traitements se basaient sur des perfusions sanguines en cas d'accidents graves : des transfusions qui ont causé de nombreux problèmes. Trop ponctuelles, elles ne pouvaient enrayer les saignements spontanés des hémophiles qui détruisent leurs articulations : les hémarthroses

Depuis, la science a fait beaucoup de progrès. Les transfusions apportent le facteur de coagulation qui manque, VIII ou IX, et sont désormais parfaitement sûres, sans risque de contamination. Un traitement préventif est aussi indiqué en cas d'hémophilie sévère ou modérée, notamment en cas d'hématomes dans les articulations ou les muscles, ou de graves hémorragies, digestives ou dans le crâne. Mais dans la plupart des pays d'Afrique, ces transfusions sont hors de prix. Jusqu'à quand ? 

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