Dr Axel Stéphane Nwaha Makon : "La circoncision doit être pratiquée par des chirurgiens"

L’Hôpital Laquinitinie, principale formation hospitalière de la ville de Douala, a repris son programme d'opération et de formation des médecins à la circoncision, après une interruption imposée par la pandémie de Covid-19.

Arnaud Ntchapda
Arnaud Ntchapda
Rédigé le , mis à jour le
La circoncision peut entraîner de graves complications si elle n'est pas pratiquée par un chirurgien qualifié (Image d'illustration)
La circoncision peut entraîner de graves complications si elle n'est pas pratiquée par un chirurgien qualifié (Image d'illustration)

La circoncision doit être prise au sérieux ! Le service de chirurgie de l’hôpital Laquintinie situé à Douala, a choisi la période des vacances scolaires pour relancer son programme de circoncision. Les interventions chirurgicales se sont déroulées les 27, 28 et 29 juillet et ont concerné une centaine de garçons. Ces journées, placées sous le thème des "bonnes pratiques de la circoncision au Cameroun", ont été l’occasion de renforcer les capacités des personnels de santé grâce à l'équipe du chef du service d’urologie, Axel Stéphane Nwaha Makon. AlloDocteurs Africa a rencontré le chirurgien urologue pour un entretien. 

AlloDocteurs Africa : Pourquoi avoir organisé des journées de circoncision ?

Dr Axel Stéphane Nwaha Makon : Nous avons constaté qu’il y avait beaucoup d’accidents, que nous recevions dans notre structure hospitalière, alors nous nous sommes demandé comment faire pour prévenir ces accidents de la circoncision. Nous avons réalisé une étude dans la ville de Douala, qui a montré que 131 circoncisions faites ces 5 dernières années avaient connu des complications assez dramatiques. Certains patients ont vu leurs verges amputées, d’autres ont saigné jusqu’à en mourir, certains ont été atteints de tétanos post-circoncision, de fistules urétro-cutanées, d'autres ont eu des infections graves comme des nécroses du gland, la tête du pénis. Vous imaginez que la vie sexuelle future de ces enfants-là est un drame social, psychologique, sans parler des difficultés pour uriner. L’une des réponses pour limiter ces incidents est d'appliquer une stratégie préventive. Cela veut dire que nous-mêmes, les spécialistes de la sphère uro-génitale, devrions réaliser ces circoncisions pour le plus grand nombre. Ainsi, nous allons diminuer la fréquence de ces accidents de circoncision. 

A.D.A : Qu’est-ce qui est la cause de ces accidents ? 

Dr Axel Stéphane Nwaha Makon : Il faut savoir que la circoncision est la chirurgie la plus pratiquée dans le monde. 30% de la population masculine mondiale serait circoncise. C’est une intervention qu’on réalise aussi pour des besoins culturels. Ce sont des interventions qui ne sont pas toujours faites par des mains expertes, des mains habituées, entraînées. C’est la raison pour laquelle je pense qu’il y a beaucoup d’accidents. Il faut dire au public que la circoncision n’est pas un acte banal ! Il s’agit d’une chirurgie à part entière et pour cette raison, elle doit être pratiquée par des chirurgiens. Mais comme notre système de santé ne dessert pas encore efficacement toute la population du Cameroun, il faut avant tout que le personnel se fasse se former à la réalisation de ce geste avant de se lancer. En 2021, on ne devrait plus avoir recours aux gens qui effectuent des circoncisions traditionnelles. Elles sont pourvoyeuses de beaucoup de complications. 

A.D.A : Avez-vous prévu de former ceux qui n’ont pas la maîtrise technique requise ?

Dr Axel Stéphane Nwaha Makon : L’un des objectifs de la campagne de circoncision était de former et nous avons constaté un afflux massif de médecins généralistes et de personnels paramédicaux. Tous ont appris beaucoup de choses. Ils se sont rendu compte des erreurs qu’ils commettaient. Nous sommes contents de les avoir formés, ce sont nos ambassadeurs ! Où qu’ils soient, ils pourront reproduire les gestes qu’ils ont vu les experts faire. C’est un projet que nous n’allons pas abandonner. Nous avions démarré les campagnes de circoncision et la formation en 2019, mais la pandémie du Covid-19 nous a freiné. D’ici 10, 15, 20 ans, nous aurons formé beaucoup de monde, ce qui permettra d’avoir moins de complications.     

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